A l'adresse du Maire de Grigny et du Premier Ministre, entre autres responsables.
Ci-dessous, le courrier envoyé ce jour à Monsieur Philippe Rio, Maire de Grigny, en copie à : Monsieur Stéphane Raffalli, Maire de Ris-Orangis ; Monsieur Jérôme Guedj, Président du Conseil Général de l'Essonne ; Monsieur Bernard Schmeltz, Préfet de l'Essonne ; Monsieur Jérôme Normand, Sous-Préfet de la Région Île-de-France ; Monsieur Manuel Demougeot, directeur de cabinet du Délégué Interministériel à l'Hébergement et l'Accès au Logement ; Monsieur Manuel Valls, Premier Ministre.
A l’attention de Monsieur Philippe Rio
Maire de Grigny
Hôtel de Ville BP 13
91351 Grigny Cedex
Paris, le 12 août 2014
Monsieur le Maire,
Les mots que depuis avril 2013 nous vous avons envoyés ont démontré leur grande inefficacité. Ils vous étaient adressés afin de vous convaincre de coopérer avec les membres du PEROU que nous sommes (artistes, architectes, urbanistes, travailleurs sociaux, chercheurs) et d’épargner ainsi aux familles établies sur le bidonville de la Folie l’indigence des réponses d’urgence. Ces mots n’ont reçu en écho de votre part qu’un silence hostile, annonce du vacarme des pelleteuses constaté le 5 août dernier.
Si nous savions vous atteindre par écrit, les mots que nous vous écrivons aujourd’hui sauraient vous faire entendre combien était absurde votre décision de faire détruire le bidonville de la Folie. Cette absurdité, cause d’une violence inouïe faite aux familles réfugiées sur le territoire de la commune de Grigny, vous n’en prendrez donc pas la mesure, abrité que vous êtes derrière des discours aussi inconsistants que généralisés. Comme vous en effet, les maires de France et de Navarre aujourd’hui confrontés à l’existence d’un bidonville sur leur territoire accusent l’Etat, l’Europe, la Roumanie, le Grand Capital, et tout autre responsable majuscule. L’irresponsabilité est devenue un argument. Elle fonctionne comme une autorisation de conduire une politique irresponsable. Ainsi, à l’instar de bien d’autres élus, avez-vous engagés des fonds publics extravagants pour faire qu’un bidonville incommodant à vos yeux se déplace de quelques mètres à peine, jusque sous les yeux d’un voisin, ennemi politique de préférence. Le tout en prétendant ne pas avoir à apporter de réponse à une situation dont vous ne maîtriseriez pas la cause. Ce qui s’avère une philosophie de l’action publique délirante, bien qu’en voie de banalisation.
Alors, puisque vous écrire ne produit aucun effet sur le devenir des familles, nous vous faisons parvenir quelques-unes des images que nous avons produites. Il s’agit d’un travail conduit par l’artiste Mickaël Phelippeau dans le bidonville de la Folie : des portraits d’une jeune fille qui vivait là avec sa famille. Le 5 août dernier, jour de leur expulsion, Violeta et sa famille ont été orientés par vos services vers un hôtel à Pontoise, à 72km de l’Hôtel de Ville de Grigny. Suffisamment éloignés pour ne plus avoir à vous en soucier. Las : scolarisée non loin de chez vous, elle et sa famille se rapprocheront fatalement de votre territoire dans les jours prochains. Vous ne connaissez pas Violeta. C’est dommage : elle est formidable. Gageons que ces images vous permettent prochainement de la reconnaître, et de considérer autrement sa présence parmi nous.
Depuis avril 2013, nos mots ne sont jamais parvenus à vous faire entendre que la procédure d’expulsion que vous avez engagée contre ces familles était catastrophique non seulement pour elles, mais pour nous tous, vous y compris. Ces images peut-être abîmeront-elles vos certitudes ? Il est fort à parier que seule la réinstallation de Violeta et de sa famille sur votre territoire pourrait produire un quelconque effet. Vous conduisant à agir, à l’endroit des familles vivant en bidonville, de manière «responsable» ? A moins que vous redoubliez de violence ? Nous redoublerons alors d’actes, de mots et d’images pour y faire face.
Sébastien Thiéry, coordinateur des actions du PEROU.
http://perou-risorangis.blogspot.fr/2014/08/a-ladresse-du-maire-de-grigny-et-de.html