On revient de Brest, ou nous participions aux 6éme rencontre des usages coopératifs, Axelle Lemaire est intervenue aux rencontres des usages coopératif à Brest, secrétaire d’État chargée du Numérique dans le gouvernement Valls depuis le 9 avril 2014, elle est née le 18 octobre 1974 à Ottawa, femme politique franco-canadienne membre du Parti socialiste. Élue en 2012 députée de la troisième circonscription des Français établis hors de France (Europe du Nord) et secrétaire nationale du Parti Socialiste aux droits de l'Homme. (discours de Brest,rapporté d’après les notes de François Bernard). Après avoir visité au pas de charge, les différents ateliers des rencontres, suivi d'un nuage de messieurs en costume, elle a prononcé un discours devant les participants et déjeuné à la cantine de Telecom Bretagne avec les participants des rencontres.
Merci beaucoup de votre accueil , je suis très heureuse d'être parmi vous ici à Brest, très heureuse d'être accueillie par ce soleil et je crois sans peine qu'il est éternel, c'est la londonienne qui vous parle.
Je devrais suivant les formes imposées, vous faire un discours, pour annoncer ou faire semblant d'annoncer, quelques pistes de travail du gouvernement sur les questions numériques, en réalité j'ai plutôt envie de partager avec vous, ce que j'ai appris ce matin dans ce 6éme forum des usages coopératifs, et de partager avec vous la réflexion que cela a induit pour un responsable du gouvernement dans la manière de travailler, dans les pistes que l'on pourrait explorer pour tenter de faire vivre les usages auxquels vous avez réfléchi ce matin, dans l'ensemble des territoires, avec une dynamique qui pourrait être portée et nourrie par l'Etat au niveau national. Alors Internet, je l'entend souvent, je le lis plus souvent encore c'est du virtuel, c'est de la déshumanisation, c'est la casse du lien social, c'est l'archétype du monde individualiste et consumériste , du monde dans lequel nous vivons, Internet c'est donc bad, bad, bad, bad, bad, bad...La réalité d'internet que je vois tous les jours dans mon travail, c'est que c'est un formidable outil, un outil et non pas une fin, au service de la création, de la re-création du lien social, un outil qui s'ancre profondément sur les territoires. Tout globalisé qu'il est cet outil, tout international qu'est le cyberespace, tout sans frontière qu'il est, Internet est très local, et qu'il arrive à mettre en réseau les individus et les communautés, ça c'est la réalité que j'ai vu ce matin et que je vois tous les jours dans l'exercice de mon portefeuille. Lorsque j'étais élue député, j'ai habité pendant plusieurs années en Europe du nord, et je constatais un bouillonnement, notamment au niveau des usages du numérique, puis lorsque je suis arrivé à l'Assemblée Nationale et que j'ai voulu m’intéresser au sujet , tout inspiré de ce que j'avais pu voir ailleurs, on parlait de tuyaux, de structures, d'usine, de dur, on m'a beaucoup parlé de culture, mais en fait pas vraiment de culture, mais d'HADOPI1. C'était ce qui définissait la problématique politique en matière de numérique ; Je trouvais ça dommage, car je pensais que le numérique ne devait pas se limiter à cette approche et puis il y a eu la French Tech2, avec l'apparition, non pas l'apparition de la dynamique de La French Tech, mais l'apparition d'une identification qui permettait de caractériser, de donner un nom à la vitalité constatée des territoires français autour du développement des technologies numériques et de la manière dont elles pouvaient faire économie et faire société. Puis il y a eu une deuxième phase, qui la aussi n'est pas temporellement apparue après la French Tech mais qui commence à prendre forme dans le discours politique, c'est celle des usages numériques , on a du identifier les besoins les plus urgents, avec un risque d'exclusion, vous connaissez la thématique de la fracture numérique qui commence à être plus ancienne, mais qui est toujours très réelle, l'enjeu de la diffusion des usages avec l'inclusion citoyenne est aujourd'hui une priorité politique ,alors es que ça veut dire que l'on ne s’intéresse plus aux structures ? et que l'on ne s’intéresse plus aux enjeux de la protection des droits et des libertés publiques ? naturellement non, et on ne peut pas parler d'usage sans parler des tuyaux, et négliger les infrastructures et les droits quand internet arrive en très haut débit. C'est tout l’intérêt du plan France très haut débit, ce que je souhaiterai, c'est que lorsque l'on parle de très haut débit et c'est tout l'objet de ce plan , que l'on parle des usages qui se diffuse, de manière plus souple avec des administrations, des entreprises, des collectifs citoyens. Le plan France très haut débit3, il faut quand même en dire un mots, c'est un engagement , au plus haut niveau de l’état, porté fortement par le président de la République, qui est le plus grand chantier du quinquennat , la plus grande promesse d'engagement financier, l’État met sur la table 3,3 milliard d'Euros , les collectivités locales en mettent 3,5 pour un projet qui au total, se chiffre à 20 milliard d'euros, c'est important par les temps qui courent, pour un objectif très ambitieux de déploiement de l'internet très haut débit pour l'ensemble des français à l'échelle de tous les territoires d'ici 2022 ; et si j'en parle c'est par ce qu'il faut avoir conscience, c'est que dans les zones urbaines même ce n'est pas toujours le cas, c'est que nous ne pourrons pas parler d'usage sans s'assurer qu'internet est partout et qu'il est pour tous, c'est un enjeu qu'il faut garder à l'esprit. Alors concernant cette parole politique autour des usages, des choses ont déjà été faites, notamment par la délégation aux usages d'internet 4rattaché à mon Ministère et qui tente avec des moyens limités un budget réduit, de valoriser les initiatives prises au niveau local , avec des projets comme net public5 pour les espaces publiques numérique, avec internet sans crainte 6 la protection des mineurs, avec le portail qui a été créé et qui fournit des informations sur les filiéres professionnelles avec proxima7 , il y a eu un rapport important, et je salue de Valerie Peugeot,8 qui avec Michel Briand 9et Daniel Kaplan10 ont travaillé au sujet de l'inclusion numérique11 et ont fait une photographie des initiatives prises dans les territoires, de tous les usages qui visaient à mieux inclure grace aux outil numerique. Mais je crois qu'il faut passer à un autre stade encore et ce que j'ai vu ce matin me le confirme. Ce que j'ai vu ce matin, j'ai pris des petites notes , qui se veut collaborative et co-constructive , j'ai entendu que sans forcément augmenter les moyens et le budget on pouvait faire mieux , si on faisait ensemble , qu'il fallait pouvoir libérer l'innovation, engager tous et chacun, des espaces citoyens des sites web, des facebook, des espaces de discussion. Avec une initiative très intéressante à Brest avec le réseau de 145 documentalistes qui quelque soient leurs institutions d'origine, qui travaillent ensemble les biblio remix12, j'ai entendu qu'il ne fallait pas attendre que les hiérarchies se mettent d'accord pour agir, qu'il fallait pouvoir imaginer et utiliser son pouvoir d'action ensemble et dans le collectif, omme les brestois, qui pourraient connaître un avenir plus global , être en attention, donner à voir , s'outiller et coopérer efficacement , et autour de ces principes des déclinaisons très pratiques, très concrètes dans le quotidien des citoyens brestois, wikibrest 13par exemple qui permet de lire des recettes de soupes locales, de connaître des chansons que l'on ne connaissait pas . J'ai entendu que ces initiatives, demandaient à être reconnues, qu'il fallait plus de reconnaissance de la part des services de l'Etat, que la bidouille ouverte était devenu un mouvement national, qu'il fallait passer à l'acte, Lao Tseu le disait : mieux vaut allumer une bougie que maudire les ténèbres, j'ai appris beaucoup de choses sur la facilitation des nouveaux métiers du numérique dans les territoires , notamment les forgeurs numériques, les tuteurs numériques, je connaissais les community manager, le terme est en anglais et il a un peu vieilli, ceux qui coordonnent les fablab. Sur les villes intelligentes que je connaissais sous l'angle technique, du formidable progrès technologique et d'une meilleur efficience qu'elles peuvent apporter au quotidien, l'impact économiques qu'elles ont , mais je ne savais pas que derrière elles, il y avait 7 milliard d'urbanistes, avec la programmatique de ces villes intelligentes , des méthodes collaboratives interactives, on commence à comprendre qu'il y avait une problématique dans le lien entre ces initiatives et les élus qu'ils soient locaux ou nationaux et les représentant du pouvoir institutionnel en général, qui peuvent craindre que leur légitimité soient remise en cause par ces initiatives.S'agit-il d'individualisme ? non, il suffit de croire aux vertus de l'intelligence collective.
Sur l'E.inclusion j'ai appris que la thématique des migrants connectés permettait de parler moins de migrants déracinés, que derrière le maillage des acteurs sociaux, derrière celui que les migrants appellent, mon français qui offre un téléphone portable, qui ouvre une adresse internet qui fait visiter les magasins du quartier, mon français, c'est une intégration par le bas souvent grâce aux outils numériques mais qui n'entre pas dans les radars des médias et des politiques. J'ai compris, je crois, que sans compter sur la force de ces initiatives locales, qui apportent du contenu, si on laissait aveuglément internet arriver par les tuyaux, sans s'interroger sur le contenu de ce qu'il allait arriver dans ces tuyaux, on risquait une colonisation, c'est le terme entendu, des régions françaises par les géants de l'internet qui font de la captation de la valeur et pas de véritable création.
Sur l'école, j'ai entendu parler des pédagogies innovantes , des pédagogies actives qui réorganisent l'espace physique de la classe, qui permettent de bousculer l'autorité de l'enseignant sans pour autant remettre en cause la figure hiérarchique du maître, et permettent aux enfant et notamment aux décrocheurs scolaires de trouver un intérêt pour l'école, le problème c'est que parfois un règlement intérieur fabriquer de manière collaborative avec les enfants, et bien l’année d’après il va être discuté par les parents, l'année d’après par le rectorat, puis par le Ministère et finalement peu de suivi est donné à ces projets locaux ou le citoyen, consommateur doit devenir contributeur, cela pose la question de la gouvernance de l'Etat. J’arrêterai ici , mais j'aurai pu aussi parler d'open data, d'économie de la donné comme contribution informative, avec cette idée de lier les fablabs par exemple aux infos labs, autour d'espaces physiques ou numériques , avec en point de départ, l'ensemble des donnés partagées par les citoyens. Il y a aussi des modèles économiques qui sont apparus récemment, qui oblige à penser l'économie non plus en silo verticaux, par secteur industriel et par filières mais qui oblige à la transversalité, c'est par exemple la question du transport et de la mobilité, on ne pose plus la question de la construction d'une voiture, mais de la question du parcours de celui qui l'utilise du matin au soir, en fonction de l'utilisation de l'espace , voilà pour le compte rendu des ateliers .
La question maintenant, c'est qu'est ce que j'en retiens ?, qu'est ce j'en fais ? J'en retiens un petit nuage de mot, un nuage de tags,( elle s'adresse à Michel Briand ), pouvoir d'agir, bien commun, coproduction, réseaux, dialogue citoyen, innovations ascendantes je me pose la question quoi faire de tout cela ? je crois qu'il faut pouvoir réunir autour d'espace, par ce que je continue à croire à l'espace physique, à la vertu des rencontres inter-personnel, il faut donc continuer la réflexion autour d'espace qui soient dédiés au numérique , longtemps ils ont été dédiés à l’accès à internet, les équipements sont évidemment essentiels, mais maintenant ces espaces ils évoluent vers les usages et peuvent devenir les catalyseurs d'initiatives locales, dans les ecoles des telecom on parle de plan de mutualisation et je dois vous avouer que je n'ai pas vraiment compris de quoi il s'agissait . La forme de ces espaces importe peu , il peut s'agir d'EPN, de maison de service au public, de médiathèque, de fablab , de tiers lieux ou d'espace de co-working cette liste est longue et elle se définit par une chose, qui est sa diversité et la difficulté de les caractériser. Mais ce ne serait que des coquilles vides, sans la présence, des médiateurs qui permettent de répondre aux demandes qui leurs sont adressées , l’intérêt des emplois d'avenir qui ont été créé dans le EPN qui sont en cours de déploiement et qu'ils permettront de faire vivre ces usages dans les territoires tout en redonnant espoir aux jeunes qui en bénéficient. Sur ce sujet ma conception de l'état est simple, il ne s'agit en aucun cas de remplacer les acteurs des écosystèmes numérique , de faire une grande entreprise de planification, il faut s'inspirer ce qui fait la force d'internet et suivant les méthodes très multi parties prenantes, d'Internet qui est la mise en réseau, la valorisation des initiatives, l'échange d'informations, les bonnes pratiques que l'on voit dans les collectivités, les associations et chez les particuliers donc je crois que c'est la un rôle qui pourrait-être tenu par l'Agence du numérique 14, elle sera inauguré en septembre et elle aura trois pôle :
un pôle dédié à la french Tech pour les liens avec les startup en particulier, les acteurs économiques du numériques et un pôle dédié aux usages. Une action qui doit se placer dans la décentralisation avec une monté en puissance des territoires , en particulier des régions et des métropoles, il s'agit donc pour l'état d'identifier ce qui se fait au niveau local pour mieux ensuite le diffuser , voilà ce que pourrait-être le rôle de cette Agence du numérique, la difficulté pour moi sera de traduire ce que je viens de vous dire dans un décret et une circulaire, sur la méthode vous l'avez compris je crois que le co-constructif, le collaboratif, le bottom up la méthode de création et de décision de la base vers le haut sont non seulement des fondamentaux, ou devrait l'être de la démocratie, des incontournables aujourd'hui, les démocraties sont malmenées, les citoyens n'ont plus confiance, il y a une rupture entre les responsables politiques et leurs électeurs, le risque est donc grand que ce que vous représentez , ce que vous faites par vos vos actions ne soient pas entendues, le risque est celui d'une plus grande dilution encore, l'enjeu il est là, soi l’état entend ce que vous faites, soi d'autres modèles économiques plus puissants et dont nous ne voulons pas, s'en emparerons nous n'avons tout simplement pas le choix , si nous croyons à la démocratie, nous devons transformer nos méthodes de travail et notre manière de faire Etat. Es que ça menace les élus ? je ne crois pas, par ce que d'associer les citoyens à notre travail, ça permet aux citoyens de comprendre que c'est quand même compliqué de prendre une décision politique et d'essayer de mélanger tous les intérêts particulier, pour finalement décider en fonction de l’intérêt général. Je crois à l'implication citoyenne, non pas seulement pour avoir bonne conscience en consultant, sur le mode de la concertation mais en co-construisant, c'est un enjeu vital pour la France du XXI éme siècle.
Je vous remercie
1L'Hadopi est une institution exclusivement dédiée à la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet http://www.hadopi.fr
2La French Tech est le nom collectif pour désigner tous les acteurs de l’ écosystème de startups français. http://www.lafrenchtech.com
4http://www.delegation.internet.gouv.fr/ La Délégation aux Usages de l'Internet (DUI) est chargée de proposer et de coordonner des mesures permettant la diffusion des technologies de l’Internet auprès de l’ensemble des citoyens ainsi que d’accompagner les entreprises de l’Internet face aux mutations du réseau.
5http://www.netpublic.fr/
6Protéger et informer sur les risques de l’Internet pour les mineurs http://www.internetsanscrainte.fr/
7Le portail Proxima Mobile a aussi pour vocation de stimuler l’écosystème des services sur terminaux mobiles en France et en Europe. http://www.proximamobile.fr/
8Chercheuse à Orange Labs, en charge des questions de prospective au sein du laboratoire de sciences humaines et sociales, Présidente de l’association VECAM, membre duConseil national du numérique Conseil national du numérique
9Directeur adjoint de la Formation à Telecom Bretagne et co animateur du magazine Innovation-pédagogique
Membre du Conseil National du Numérique.Elu EELV (1995-2014) à Brest, en charge d’internet et du multimédia et à Brest Métropole Océane en charge de l’Economie sociale et solidaire et de l’aménagement numérique du territoire .
Il est le concepteur et l'organisateur des rencontres des usages coopératifs
10délégué général de la Fondation internet nouvelle génération (Fing).Membre de la Chambre d'experts du programme e-Europe, membre du Conseil stratégique des technologies de l'information placé auprès du Premier ministre, cofondateur et administrateur du Chapitre français de l'Internet Society,
11Rapport téléchar http://www.cnnumerique.fr/wp-content/uploads/2013/12/Rapport-CNNum-10.12-1.pdf
12http://biblioremix.wordpress.com/
13 le site collaboratif du patrimoine et du vivre ensemble à Brest et au Pays de Brest http://www.wiki-brest.net
14Cette agence regroupera l'actuelle Mission France THD, la Délégation aux usages de l'Internet (DUI) et les équipes dédiées à la French Tech. Elle sera rattachée à Bercy. Fusionner ces structures peut vouloir marquer la volonté d'associer le développement des infrastructures télécoms et celui des usages.